A l’annonce du diagnostic par mon médecin, je suis restée de marbre. Le savais-je déjà ? Portais-je déjà cette intuition de la mort en moi ? Tel un oracle en moi qui envahissait toute mon âme et empêchait déjà toute projection ?
Toujours est-il que j’ai eu envie de lui répondre : je le savais déjà. J’avais déjà reçu la nouvelle, je l’avais reçu je ne sais comment, mais je l’avais intégrée. Mon esprit en tout cas l’avait fait.
J’ai eu envie de lui dire : ne soyez pas chagriné, mais surtout ne me plaignez pas. Il était consterné, perdu, surpris par mon calme, par la douceur avec laquelle je lui répondais.
Etais-je seulement consciente ? A quel point mon MOI et mon SURMOI étaient entrés en interaction ? Qui pilotait l’avion ? Je n’en savais rien. J’ai écouté le protocole et ai compris qu’il serait absent : “bien entendu, je serai disponible pour vous”. Il m’a donné ses coordonnées. Mais à quoi bon ? A quoi bon être accessible ? Notre système médical venait d’introduire une rupture dans mon suivi que je ne comprenais pas. Je n’avais pas la force de protester, de questionner cette incongruité. Je ne pouvais que subir.
Ce que je n’ai pas imaginé une seule seconde, c’est à quelle point j’allais subir cet évènement.
Je suis rentrée… je suis retournée travailler. Je ne me suis pas effondrée. Mais j’allais m’effondrer plus tard de la pire des façons pour une personnalité comme la mienne. Que j’ai regretté de ne pas être simplement comme la plupart des gens dans ce monde ? J’aurais dû pleurer, appeler mon mari, m’effondrer, ne pas retourner au travail.
Non, je suis allée au travail. Je suis rentrée et ai embrassé mon fils. J’ai attendu le retour de mon mari et… je ne lui ai rien dit. Je suis allée me coucher.