La sidération : anéantissement soudain des fonctions vitales, avec état de mort apparente, sous l’effet d’un violent choc émotionnel.
le robert
Il m’aura fallu trois semaines. Trois longues semaines il aura fallu pour sortir de cet état. Il a fallu qu’au fil de mes rencontres précieuses, l’une de mes personnes ressources pose des mots sur cet état.
Etais-je sidérée ? En tout cas, j’ai tenté de continuer à vivre. J’ai espéré les symptômes attendus. Je les ai guettés. Alors même que je savais ma spécificité. Je savais que rien ne se passerait comme prévu. Je ne suis jamais dans le 80 %. Je ne suis pas dans les 90 % non plus. 95 % ? Non plus. Je suis le type d’exception qui fait cogiter un médecin mais le fait jubiler en même temps.
J’ai attendu encore. Encore et encore. Je suis restée à l’écoute du moindre signe.
J’ai tenté de sauver les fêtes. J’ai préparé les cadeaux. J’a porté la mort en moi dans tous ces lieux pleins de vie ou en quête de vie. J’ai cuisiné mes meilleurs plats. J’ai continué de vivre en espérant que la vie renaisse en moi.
Il n’y a eu aucune émotion. Pire, j’observais les émotions comme si elles faisaient partie d’un tableau de nature morte. Elles ne m’atteignaient pas : sourire, rire, pleurs, colère, déception, frustration. RIEN. RIEN.
Face aux analyses répétitives, aux diagnostics répétés, mes émotions étaient aux abonnés absents. Les annonces répétées, froides, cruelles bien éloignées de mes échanges avec mon médecin auraient pu m’éveiller à la vie. Il n’en fut rien. Je les voyais se débattre appeler les Chefs de Service tout en sachant que je n’échapperais pas au protocole le plus robuste. C’est ainsi. Ne vous demandez pas comment je le savais. Je le savais c’était tout.
Le seul moment où je suis revenu à un peu de vie, c’est quand ils ont compris et qu’il fallait que je décide pour moi-même. Décider pour ne pas mourir complètement. Ne pas laisser cette décision à une autre personne. C’était mon corps, ce serait ma décision. Etait-ce superfétatoire ? Certainement. Etait-ce utile ? Qu’en sais-je ? En avais-je besoin dans un élan de vie ? Absolument.
Je pensais que c’était le début de la fin. Mon coeur ricane. C’était le début de l’horreur… de la tempête.
J’étais aux portes de l’abime… La vague était si haute… que je ne pouvais ni la voir ni la deviner.